Kurmâsana la Tortue est une posture assise de yoga qui ouvre les hanches et est reliée à Muladhara (la Terre) et à Swadhistana (l’Eau), les deux chakras de la base. Si quelqu'un vous regarde d'en haut, vous aurez l’air d’une tortue, votre dos évoquant sa carapace : d'où Kurmâsana (ou Kachhapâsana), de kurma : tortue.
Le yoga est une école d'ouverture et d'épanouissement mais aussi un espace de silence. Certaines positions invitent le souffle à ralentir, voire à se suspendre, au-delà du va-et-vient habituel de la respiration basique. Lente et calme, la tortue s'isole, quand le besoin s'en fait sentir, dans sa carapace, formant un espace de protection où votre esprit se sentira en sécurité. Elle ralentit encore son rythme et amène en son centre les énergies de la Terre (Apâna) et du Ciel (Prâna), symbolisées par un dôme - sa carapace - et un ferme ancrage sur la Terre. Là, depuis ce sanctuaire paisible, Kurma s'observe vivre.
Sur le plan subtil, Kurmâsana la Tortue exerce son effet sur l'intériorisation et le retrait des sens (Prathyahara), stimule les chakras inférieurs : Muladhara et Swadhistana, accessoirement Manipura (plexus solaire). Le circuit de l’énergie est montant : de la Base vers Ajna (3e Œil).
C'est de la « petite Tortue », variante la plus accessible de Kurmâsana, parfois nommée « posture de l’Huître », dont nous parlerons dans cette fiche. La « grande Tortue » est une posture avancée que nous verrons ultérieurement.
Bienfaits de Kurmâsana la Tortue
- Cette position de yoga délie la colonne vertébrale, dégage le bas du dos, tonifie les muscles dorsaux : une prévention aux déformations.
- Renforce les cuisses, ouvre épaules et hanches en étirant les muscles : entretient votre souplesse.
- Bonne pour les poumons et le cœur.
- Soigne la zone du plancher pelvien chez les hommes comme chez les femmes.
- Tonifie les organes abdominaux et stimule le fonctionnement des organes digestifs : foie et estomac (aide à la digestion), intestins (favorise l'élimination).
- Stimule le plexus solaire ainsi que Samana Vayu, le prana de la digestion, et celui de la force centripète (« qui tend à rapprocher du centre »).
- Rafraîchit légèrement l’ensemble du corps.
- Apaise le système nerveux : pour les colériques et ceux qui réagissent de manière excessive au stress.
- Détend, relaxe, met dans le recul personnel, intériorise.
- Régule le sommeil, calme l’anxiété, les angoisses, la peur de la mort.
Contre-indications
- Fragilité ou douleurs de n'importe quelle sorte du dos et de la colonne vertébrale.
- Fragilité ou douleurs des hanches.
- Fragilité du genou, tout particulièrement en cas de lésion du ménisque.
1. Préparez la Tortue : le Papillon
Avant de vous adonner à ces exercices, même s'ils sont préparatoires, il est conseillé de commencer par un petit échauffement global, 2-3 cycles de Salutation au Soleil, par exemple.
L'étirement des adducteurs
Cet exercice, emprunté aux sportifs, permet d'étirer les adducteurs (muscles des cuisses, qui ont pour rôle de rapprocher un membre de l'autre) suivant la méthode de « contraction-décontraction-tension ».
- Assis sur le sol, genoux pliés et pieds côte à côte, l'angle de flexion des genoux doit vous permettre d'atteindre les chevilles avec les mains.
- Placez un avant-bras en travers des genoux.
- Rapprochez les genoux l'un de l'autre en les pressant sur l'avant-bras (contraction musculaire) pendant 20-30 secondes.
- Relâchez (décontraction).
- Maintenant, placez les talons l'un contre l'autre et tenez les chevilles avec les mains.
- Avec les coudes, appuyez doucement sur les genoux de sorte qu'ils s'écartent jusqu'à une position extrême (tension).
- Pliez le torse vers l'avant au-dessus des jambes et conservez la position pendant 20-30 secondes.
- Vous devez sentir la traction le long de la partie interne de la cuisse.
- Reprenez l'ensemble deux autres fois.
Le Papillon Baddha-konâsana « qui tangue »
- Bien assis sur les ischions (os des fesses), pliez les genoux pour approcher les talons du pubis et mettre les plantes des pieds l’une contre l’autre.
- Redressez la colonne vertébrale sans basculer un tant soit peu le bassin vers arrière : si c’est le cas, éloignez les pieds du pubis.
- Mettez de l’espace entre le nombril et les clavicules, en respirant profondément et en ouvrant la poitrine vers l’avant.
- Attrapez les pieds sans plier les coudes : vous êtes dans la posture du Papillon.
Gardez cette posture pour la phase dynamique suivante :
- Basculez le poids de votre corps vers la droite puis vers la gauche : faites-le tanguer d'un côté, de l'autre… avec peu d'élan au début.
- Augmentez progressivement l'amplitude du mouvement.
- Tanguez ainsi pendant quelques secondes.
Variante récréative : il se peut, qu'avec une bonne aisance dans le mouvement et plus d'élan, vous arriviez à faire un tour complet et vous retrouver sur les genoux, pour repartir dans l'autre sens… Le but de l'exercice n'est pas d'atteindre ce niveau qui, amusant, peut s'envisager comme une récréation. Il aura l'avantage d'entretenir votre souplesse.
2. Préparez la Tortue : les étirements assis
Avant de vous adonner à ces exercices, il est conseillé de commencer par un petit échauffement global, 2-3 cycles de Salutation au Soleil, par exemple, ou de les exécuter à la suite de l'étape 1.
L'étirement des lombes
Les lombes sont des parties musculaires du tronc, situées en arrière de l’abdomen, de part et d'autre de la colonne vertébrale, en bas du dos (au niveau des vertèbres lombaires, dans la région des « reins »). Le muscle carré des lombes, comme son nom l'indique, présente quatre côtés ; ce muscle permet au bassin et au tronc de basculer sur le côté.
Les trop nombreuses positions assises, au cours de la journée, font que le corps se tasse, la respiration s'amenuise. Cet étirement du segment lombaire de la colonne vertébrale peut pallier ces inconvénients.
- Vous êtes assis au sol, les genoux écartés et les bords des pieds se touchent.
- Passez vos mains entre et sous les jambes pour les enrober de vos bras, de l'intérieur vers l'extérieur.
- Descendez les épaules à hauteur de la face interne des genoux.
- Enlacez les mains, au niveau des chevilles.
- Ne fléchissez pas la tête, qui doit au contraire être étirée vers le haut tandis que, par traction des bras sur les pieds, vous inclinez le thorax vers l'avant-bas.
Cette double traction aura pour effet de décoller la cinquième vertèbre lombaire (celle qui se trouve en haut du sacrum).À exécuter 2 fois successivement, pas davantage.
L'étirement assis
Cet assouplissement de la colonne vertébrale vous permettra de la garder en bonne forme. Vos reins aussi s'en trouveront bien, tandis qu'un début d'embonpoint peut s'atténuer puis disparaître.
- Asseyez-vous sur le sol.
- Étendez les jambes devant vous en joignant les pieds. Respirez normalement.
- Pliez maintenant les genoux en écartant largement les cuisses pour ramener vos pieds plante contre plante.
- Glissez vos bras sous les cuisses en passant par l'intérieur ; les avant-bras sont glissés sous les jambes afin de vous permettre de saisir les chevilles par l’extérieur.
- Simultanément, penchez le buste en baissant la tête comme si vous vouliez poser votre front sur vos talons joints.
Remarque : vous n'y arriverez pas tout de suite et ce n'est pas le but de cet exercice, qui est d'échauffer et d'étirer la colonne vertébrale en douceur (voir étape 3).
- Restez dans la posture le temps de quelques respirations tranquilles.
Conseil 1 : n'abandonnez pas cette posture si vous ressentez quelque douleur dans la région pubienne, elle est tout à fait normale et s'atténuera peu à peu avec la pratique.
Conseil 2 : ne vous découragez pas ! Une colonne vertébrale rouillée et quelques kilos superflus rendent l'exercice plus difficile mais ne forcez pas et travaillez avec le maximum de souplesse.
3. Placez la Tortue et respirez... lentement
Kurmâsana la petite Tortue
Cette Tortue est pratiquée en fin de séance ou avant une séance de Yoga-nidrâ. C’est une posture d’intériorisation qui fait l’union entre les chakras Muladharâ (chakra-racine) – la Terre, l'animalité, et Ajna (troisième œil) - le Ciel, la spiritualité. Elle vous demandera un entraînement plus ou moins prolongé, mais vous en retirerez, dès les premiers essais, des bénéfices certains. Les conseils sont les mêmes que pour l'étirement assis (étape 2).
Le Yoga-nidrâ, littéralement le « yoga du sommeil », est une pratique multi-millénaire de visualisation en relaxation profonde, très similaire au sommeil lent léger, qui aide à se libérer des émotions négatives et à retrouver une bonne qualité de sommeil.
- En position assise, pliez les jambes de façon à placer les plantes des pieds l’une contre l’autre. Les jambes, un peu allongées, forment un losange étiré
- Inspirez en étirant la colonne vertébrale vers le haut. Mains posées sur les genoux, fermez les yeux.
- Restez ainsi un moment avec une respiration égalisée « en carré » (Samavritti) 4/4/4/4, soit : inspir 4 / poumons pleins 4 / expir 4 / à vide 4.
- Profitez-en pour visualiser le souffle qui part de la base (Muladharâ, chakra-racine) et arrive au troisième œil (Ajna).
- Au bout de quelques respirations, sur une expiration qui concentre l’énergie du souffle au niveau du nombril, fléchissez le tronc vers l'avant à partir du bassin (rentrez le ventre pour protéger le bas du dos).
- Glissez les bras entre et sous les jambes de façon à sortir les mains vers l'extérieur et les poser sur le dessus des pieds. Dans la posture complète, le front touche les pieds.
- Reprenez une nouvelle fois la respiration Samavritti ou continuez de respirer naturellement et lentement.
- Trouvez une aisance physique et mentale, reprenez la visualisation de l’union entre Muladharâ et Ajna.
- Restez dans la posture aussi longtemps qu'il vous est possible, mais attention à ne pas vous endormir !
Un mot sur Samavritti, la respiration carrée
« Sama Vritti » est une expression sanskrite où sama signifie : apaisement, tranquillité, quiétude ou égal, et vritti : fluctuation, modification. Ainsi, l'expression évoque un ralentissement des mouvements de l'esprit jusqu'à l'immobilité. Samavritti est donc une technique, simple et efficace, pour calmer le mental et équilibrer le système nerveux.
Samavritti, la respiration carrée, consiste à uniformiser les 4 phases de la respiration, à savoir inspiration (puraka), rétention poumons pleins (antara kumbhaka), expiration (rechaka) et rétention poumons vides (bahya kumbhaka). Par exemple, si la durée d'inspiration est de 5 secondes, celle de l'expiration et des rétentions est identique (5 secondes chacune).
Respirez toujours par le nez. Lors de l'inspir, l'abdomen se gonfle naturellement et à l'expir il se dégonfle tout aussi naturellement : c’est une respiration abdominale. Les rétentions de souffle (sans bloquer la glotte) ne doivent jamais être forcées et doivent constamment demeurer agréables.
Vous pouvez pratiquer Samavritti sur le compte de 2 (2/2/2/2) à 4 (4/4/4/4) ou plus, suivant la vitesse de comptage et la maîtrise respiratoire. Pratiquer 10 respirations carrées permet déjà d’en ressentir les bienfaits.
4. Sortez de Kurmâsana la Tortue et détente
Sortez
- Pour sortir de la posture, amenez vos mains sous les genoux.
- Sur une nouvelle inspiration, en vous aidant de la poussée des bras, venez vous asseoir.
Détente
- Prenez à la suite une contre-posture d'ouverture comme le Plan incliné (Purvottanâsana) qui permet d'ouvrir la poitrine, « fermée » lors de la prise de Kurmâsana la Tortue.
- Relaxez-vous quelques secondes en Shavâsana (le Cadavre).
- Vous pouvez également enchaîner avec une contre-posture d'étirement comme le Chien tête en bas (Adho-mukha-svanâsana) qui permet d'étirer les 4 membres, repliés lors de la prise de Kurmâsana la Tortue.
- Puis, placez-vous dans la posture du Fœtus (Garbhâsana) et reposez-vous quelques secondes.